La nervosité est encore de mise sur les marchés financiers. Deux grand événements perturbent toujours l’économie mondiale :
- La crise du Covid 19 en Chine
- La guerre en Ukraine
Nous n’allons pas revenir en détail dessus et nous vous invitons à lire nos réflexions du mois dernier sur ce sujet.
Quoiqu’il en soit, l’impact inflationniste de ces deux événements est réel et durable. Les chiffres s’emballent… Après des mois lors desquels la Banque centrale européenne (BCE) a pu sembler faire l’autruche vis-à-vis de poussée de fièvre inflationniste, la qualifiant de « temporaire », l’autruche s’est finalement muée en faucon, déterminé à lutter contre l’inflation agressivement.
Ce jeudi 9 juin 2022 sera donc à marquer d’une pierre noire pour la BCE. Le conseil des gouverneurs, par la voix de sa présidente, Christine Lagarde, a sonné la fin de la récréation. Dans un contexte où l’inflation semble lui filer entre les doigts, la BCE reprend fermement les choses en main en annonçant à la fois la fin de l’expansion de son bilan, ainsi que, surtout, sa première hausse de taux. Une décision inédite depuis 2011.
Il faut dire qu’il y a urgence, car les prix à la consommation se sont envolés de 8,1% sur un an pour l’ensemble de la zone euro. 18 mois plus tôt, seulement, ceux-ci s’inscrivaient en baisse. L’inflation dépasse même 15% dans l’ensemble des pays baltes !
La BCE en a parfaitement conscience puisqu’elle n’a pas manqué de préciser que si cette mesure risque de générer du stress sur les marchés financiers à court terme, elle n’en reste pas moins nécessaire pour stabiliser les conditions financières sur un horizon plus lointain. Il faut d’abord faire « mal » pour après soulager.
Terminé donc le soutien direct au financement des États ; place à la libre confrontation de l’offre et de la demande sur les marchés obligataires, au risque d’une remontée significative du coût de financement des États, déjà lourdement endettés pour beaucoup d’entre eux.
Enfin, la suite n’est guère réjouissante car le chemin de crête du resserrement monétaire dans laquelle s’engage la BCE est à la fois étroit et vertical. Première difficulté à l’horizon dès septembre : la porte est d’ores et déjà ouverte à une double hausse de 0,50%, si l’inflation ne refluait pas dès l’été, éventualité qui, pour le moment, paraît peu probable.
S’il est « urgent d’aller plus loin », il ne faut pas non plus aller trop loin, au risque de précipiter une croissance déjà fragile dans les abîmes.
Outre-Atlantique nous observons encore un record. Le chiffre d’inflation de mai atteint 8,6% sur un an glissant, un niveau inédit depuis plus de 40 ans. La thèse du pic d’inflation est une nouvelle fois battue en brèche. Parmi les contributeurs importants, citons le logement, l’alimentation ou encore les transports. Signalons également que plus de 70% de composants du panier d’inflation affichent des hausses supérieures à 4%. Encore un record, mais surtout le signe que la hausse des prix rampe sur un spectre de biens et services toujours plus large et que le risque de spirale inflationniste est réel. La Réserve Fédérale a frappé fort avec un hausse de 75 points de base. La bataille contre l’inflation est lancée.
Deux notes d’optimisme pour finir…
1 – Le dragon Chinois sort de la tête de l’eau. Les indices PMI Caixin chinois publiés la semaine dernière font état d’un rebond important, même s’ils restent en territoire de contraction. Avec une baisse des cas de Covid, en particulier à Shanghai, l’activité se normalise peu à peu, après avoir été mise sous cloche plusieurs semaines. Si la situation sanitaire continue de s’améliorer, il y a fort à parier qu’un rebond de l’activité pourrait se matérialiser, la Chine serait alors la seule puissance à mener un « policy mix », c’est-à-dire une relance monétaire et budgétaire sans pour autant être sous la pression d’une inflation forte.
2 – L’inflation a commencé sa nette progression au 2ème semestre de l’année dernière comme le montre le graphique ci-dessus. L’effet de base va faire naturellement revenir les taux constatés aujourd’hui sur des niveaux plus acceptables.
Ces resserrements monétaires vont peser sur la croissance économique dans les mois qui viennent. Il se peut que la nervosité persiste sur les marchés pendant l’été. Les investisseurs n’aiment pas les changements soudains des conditions de marché mais nous pouvons espérer que les corrections fortes observées sur les marchés depuis le début de l’année prennent en compte ce ralentissement économique.